Le théorème
des résidus en analyse complexe est un outil puissant pour évaluer des intégrales curvilignes de fonctions holomorphes sur des courbes fermées ; il peut
aussi bien être utilisé pour calculer des intégrales de fonctions réelles ainsi
que la somme de certaines séries. Il généralise le théorème intégral de Cauchy et la formule intégrale de Cauchy.
Sommaire
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3 Application au calcul d'intégrales réelles |
Soient U un sous-ensemble ouvert et simplement connexe du plan complexe ℂ, z1,...,zn un ensemble de points distincts et
isolés de U et f une fonction définie
et holomorphe sur U\
{z1,...,zn}.
Si γ est une courbe rectifiable dans U qui ne rencontre aucun des points singuliers zk et dont le point de départ correspond
au point d'arrivée (c'est-à-dire un lacet rectifiable),
alors :
Ici, Res(f,zk)
désigne le résidu de f en zk,
et l'indice du lacet γ par rapport à zk. Intuitivement,
l'indice du lacet est le nombre de tours autour de zk effectués par un point parcourant tout
le lacet. Ce nombre de tours est un entier ;
il est positif si γ est parcouru dans le sens inverse des aiguilles d'une
montre (sens direct) autour de zk,
nul si γ ne se déplace pas du tout autour de zk, et négatif si
γ est parcouru dans le sens des aiguilles d'une montre autour de zk.
L'indice est défini par
Démonstration
« Soit D un
ouvert de la sphère de Riemann S2, et soit f une fonction
holomorphe dans D sauf peut-être en des points isolés qui sont singuliers pour f.
Soit Γ le bord orienté d'un
compact A contenu dans D, et supposons que Γ ne contienne aucun
point singulier de f, ni le point à l'infini. Les points
singuliers zk contenus dans A sont alors en nombre fini, et
on a la relation :
où Res(f, zk) désigne le résidu de la fonction f au
point zk ; la sommation est étendue à tous les points singuliers zk∈A, y compris éventuellement le point à l'infini1. »
Pour évaluer des intégrales réelles, le
théorème des résidus s'utilise souvent de la façon suivante : l'intégrande
est prolongé en une fonction holomorphe sur un ouvert du plan complexe ;
ses résidus sont calculés, et une partie de l'axe réel est étendue à une courbe
fermée en lui attachant un demi-cercle dans le demi-plan supérieur ou
inférieur. L'intégrale suivant cette courbe peut alors être calculée en
utilisant le théorème des résidus. Souvent, la partie de l'intégrale sur le
demi-cercle tend vers zéro (lemme de Jordan),
quand le rayon de ce dernier tend vers l'infini, laissant seulement la partie
de l'intégrale sur l'axe réel, celle qui initialement nous intéressait.
La liste ci-dessous n'est pas
exhaustive mais elle permet d'avoir une idée générale de la technique utilisant
le théorème des résidus, on aborde :
§
Les intégrales du « premier
type » : où
est une fonction rationnelle,
§
Les intégrales du « second
type » : ,
§
Les intégrales du « troisième
type » : ,
§
Les intégrales du « quatrième
type » : combinaison des deux cas précédents en considérant la valeur principale de Cauchy de l'intégrale.
Soit le calcul de l'intégrale réelle
suivante :
avec une fonction rationnelle ayant un
nombre fini de points singuliers
n'appartenant pas au cercle
centré
à l'origine et de rayon 1. On obtient par le théorème des résidus :
où est définie comme suit :
Démonstration
Exemple
Figure 1. Illustration du contour (en bleu) utilisé dans la
démonstration des intégrales du second type. Les singularités (purement
complexes) de
appartenant au plan supérieur sont
représentées en rouge.
Soit le calcul de l'intégrale réelle
suivante :
avec ayant un ensemble de points singuliers
isolés
purement complexes. S'il existe
et
tels
que
pour tout complexe
de module supérieur ou égal à
,
alors
et
Remarque :
dans le cas où est une fonction rationnelle définie
par
avec
et
des polynômes, il suffit d'exiger que
(où
représente le degré du polynôme) pour
vérifier les hypothèses et appliquer l'identité.
Démonstration
Exemple
Figure 2. Illustration du contour (en bleu) utilisé dans la
démonstration des intégrales du troisième type. Les points singuliers (purement
complexes) de
appartenant
au demi-plan supérieur sont représentés en rouge.
Soit le calcul de l'intégrale réelle
suivante :
avec comportant un ensemble de point
singuliers isolés purement complexes. S'il existe
tels
que
pour
tout complexe
de module supérieur ou égal à
,
alors :
et
Démonstration
Exemple
Figure 3. Illustration du contour (en bleu) utilisé dans la
démonstration des intégrales du quatrième type. Les singularités (purement
complexes) de
appartenant
au plan supérieur sont représentées en rouge. En vert ce sont les pôles simples
réels.
Les intégrales du second et du
troisième type s'étendent aux cas avec un nombre fini n de pôles situés sur l'axe réel. Il
s'agit alors d'une intégrale impropre et l'on considère alors la valeur principale de Cauchy de l'intégrale.
Soit une fonction holomorphe sur ℂ sauf en un ensemble
de pôles simples réels,
,
et de singularités isolées purement complexes,
.
Supposons que l'on se trouve dans un des deux cas suivant :
§
il existe et
tels
que
pour tout complexe
de module supérieur ou égal à
,
ou
§
avec
et il existe
tels
que
pour
tout complexe
de module supérieur ou égal à
.
Alors la valeur principale de Cauchy
(notée ) de l'intégrale existe et on
a :
Remarque :
on peut aisément étendre la formule au demi-plan inférieur en changeant le
signe de la première somme et en considérant uniquement les singularités
purement complexe dans ce demi-plan.
Démonstration
Exemple
Le théorème des résidus permet aussi de
calculer certaines sommes infinies. Soit une fonction ayant pour chaque entier
un résidu égal au
-ième
terme général d'une somme infinie
ainsi qu'un ensemble
de résidus correspondant à d'autres
points. Supposons que l'intégrale de cette fonction le long d'un lacet
rectifiable infiniment grand soit
nulle. On a alors par le théorème des résidus :
Par conséquent, on peut exprimer la
somme infinie par une autre somme (en général finie) de résidus :
Les énoncés ci-dessous donnent des
exemples plus généraux de cas pour lesquels cette méthode est applicable :
§
les sommes du "premier
type" : ;
§
les sommes du "second
type" : .
Soit le calcul de la somme
suivante :
avec ayant un ensemble
de singularités isolées. Supposons que
la condition suivante soit respectée :
il existe et
tels
que
pour tout complexe
de module supérieur ou égal à
.
Alors, nous avons :
et
Démonstration
Exemple
Soit le calcul de la somme
suivante :
avec ayant un ensemble
de singularités isolées. Supposons que
satisfasse à la même condition que
pour les sommes du premier type à savoir :
il existe tels
que
pour tout pour tout complexe
de module supérieur ou égal à
.
Alors, la somme converge absolument et
on a :
Démonstration
Exemple
1.
Henri Cartan, Théorie élémentaire des fonctions analytiques
d'une ou plusieurs variables complexes [détail des éditions], p. 93
§
Murray R. Spiegel (en), Variables Complexes, Schaum (ISBN 2-7042-0020-3)
§
(en) Serge Lang, Complex Analysis, 4e éd., Springer, 1999 (ISBN 0-387-98592-1)
§
(en) Joseph
Bak et Donald J. Newman (en), Complex Analysis, 2e éd., Springer, 1997 (ISBN 0-387-94756-6)
§
Ernst Lindelöf, Le calcul des résidus et ses
applications à la théorie des fonctions, Gauthier-Villars, Paris, 1905